Comment les girafes ont-elles bien pu hériter de ce long cou ? Le point sur cette innovation évolutive gagnée à la grande loterie des mutations aléatoires
Une interview publiée sur Curieux.live
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« On sait que cet animal vit dans des lieux où la terre l’oblige à brouter le feuillage des arbres […]. Il est résulté de cette habitude soutenue depuis longtemps que son col s’est tellement allongé, que la girafe élève sa tête et atteint à six mètres de hauteur […] », écrivait à propos des girafes Jean Baptiste de Lamarck en 1809 dans son livre Philosophie zoologique. Tordons le cou, une bonne fois pour toutes, à cette théorie transformiste.
L’évolution ne fait pas de politique volontariste
À tort, nous prêtons souvent des verbes d’action à l’évolution comme si elle était programmée pour « améliorer » les espèces. Que nenni, cette dernière est régie par deux mécanismes indépendants. Le premier, générateur de biodiversité, est le grand loto des mutations. Au hasard de la molécule d’ADN, ces variations peuvent aboutir à de nouveaux caractères, comme le long cou de notre girafe. Avec le deuxième, la sélection naturelle, l’environnement devient le maître du jeu. Il favorise les individus porteurs de caractère avantageux, comme pour notre girafe, un accès à de la nourriture en hauteur, inaccessible pour les autres. Mais, attention, la chance peut tourner ! Vous devez avoir la bonne combinaison « mutation-environnement » pour gagner.
Une innovation qui lui monte à la tête
« Dans le groupe des girafidés, les 9 sous-espèces présentent des longueurs intermédiaires entre l’Okapi (cou court) et la girafe Masai (cou long). Pour allonger le cou, soit le nombre de vertèbres augmente, soit c’est leur taille. Or, la girafe à long cou possède 7 vertèbres cervicales comme tous les mammifères », explique Francis Duranthon, le Directeur du Muséum de Toulouse.
Une étude publiée en mars 2016 révèle des mutations au niveau de gènes impliqués dans le développement du squelette et de l’appareil cardio-vasculaire. Et pour cause, Madame a la tête à plus de 2 mètres du cœur. Autant dire qu’il faut la version turbo pour doubler la pression sanguine et alimenter à l’autre bout de la chaîne des vertèbres cervicales…
Depuis 2000, 40 % des girafes ont été victimes de la perte de leur habitat et du braconnage. Sauvegardons cette combinaison gagnante !
Sophie Nicaud